N°64 - Fraude alimentaire - 23 Septembre 2014 | Exaris.fr

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Quelle attitude pour les industriels ?

 

Bientôt deux ans après le « horse gate », ou crise de la viande de cheval, force est de constater qu’une prise de conscience a été déclenchée à tous les niveaux. Qu’on le déplore ou s’en félicite, il est difficile de nier l’évidence : après la prévention des contaminations intentionnelles malveillante de la chaîne alimentaire (Food Defense  - cf. ExarisInfo n°55), les intervenants de la chaîne agroalimentaire doivent désormais prendre en compte le risque de fraude. Par ailleurs si l’exigence de déployer un « plan Food Defense » est apparue dans les référentiels hors contexte événementiel, la problématique de la fraude s’impose, elle, par une crise majeure, révélant un contexte de récidive potentielle.

On perçoit par ailleurs que ces deux notions ne sont pas totalement distinctes, la fraude constituant une forme de malveillance, pouvant se traduire par une contamination de la chaîne alimentaire, mais pas uniquement.

Il nous semble donc intéressant d’aborder le sujet sous l’angle de trois questions :

  1. Comment définir la fraude à l’échelle de la chaîne alimentaire et quel est l’enjeu réel aujourd’hui?
  2. Comment intégrer la prise en compte de ce risque dans les systèmes de management, de manière pragmatique ?
  3.  Quels sont les moyens de maîtrise à l’échelle de l’entreprise ?
 
 

1. Comment définir la fraude alimentaire ?

 

Suite à la crise de la viande de cheval le parlement européen a publié une résolution intitulée : « Résolution du Parlement européen du 14 janvier 2014 sur la crise alimentaire, la fraude dans la chaîne alimentaire et son contrôle ».

A travers ce texte le parlement interpelle la Commission européenne en 70 points sur la base de 30 considérants. Parmi les points d’attention soulevés par le parlement on note celui-ci :

5.  « (le Parlement) constate que le droit européen ne comporte actuellement pas de définition de la fraude alimentaire et (…) qu'une définition uniforme est essentielle pour développer une approche européenne dans la lutte contre la fraude alimentaire; souligne la nécessité d'adopter rapidement une définition harmonisée à l'échelon européen (…) »

En réponse citons un article paru dans la newsletter de l’EUFIC (Conseil Européen de l'Information sur l'Alimentation) en décembre 2013 :

« Il y a fraude alimentaire dès lors que des aliments sont intentionnellement commercialisés avec tromperie du consommateur. À titre d’exemple récent, on peut citer l’ajout non-déclaré de viande de cheval dans des produits à base de viande de bœuf, l’ajout de mélamine dans du lait et des préparations pour nourrissons, et l’altération de la poudre de chili à l’aide de rouge Soudan. Pourtant, il n’existe à ce jour aucune définition précise de la « fraude alimentaire » dans la réglementation européenne. (…) »

Ces exemples illustrent l’ambiguïté sous-jacente à la fraude : s’agit-il ou non de contamination malveillante, donc entrant dans le champ de la sécurité des aliments ? Ou s’agit-il uniquement de tromperie à but lucratif mais sans volonté de nuire à la santé des consommateurs, donc relevant d’un champ plus large ? On le voit à travers les quelques exemples ci-dessus la réponse dépend du type de fraude et du profil des fraudeurs (jusqu’où sont-ils prêts à aller pour augmenter indûment leurs profits ?). Par défaut il s’agira donc de considérer le risque de fraude dans sa perspective la plus large, pouvant ou non se traduire par une contamination de la chaîne alimentaire.

 
 

2. Comment intégrer la prise en compte du risque de fraude dans les systèmes de management ?

 

En 2013 les fédérations européennes des industriels agroalimentaires ont publié plusieurs guides ou chartes, tels que la « Charte de lutte contre la fraude sur l’espèce de viande » de l’ANIA, contenant un certain nombre de recommandations pratiques, notamment concernant les contrôles de conformité et méthodes associées (cf. §3). On notera cependant que cette charte ne concerne que les matières carnées ; or dans leur résolution les parlementaires européens soulignent à juste titre :

 [Point 8] « (…) parmi les denrées alimentaires faisant souvent l'objet d'activités frauduleuses figurent l'huile d'olive, le poisson, les produits biologiques, les céréales, le miel, le café, le thé, les épices, le vin, certains jus de fruit, le lait et la viande; »

Il serait donc erroné de considérer que seule la filière viande est concernée, et plusieurs filières citées dans la résolution du parlement n’ont pas attendu la crise du Horsegate pour prendre en compte le risque de fraude.

Deux considérations simples mais déterminantes seraient donc à intégrer avant de commencer à déployer des moyens de maîtrise :

  1. Une entreprise qui cherche à prévenir la fraude et ses effets néfastes potentiels étant elle-même présumée honnête, elle associera le risque de fraude au « risque fournisseur », au sens large (filière)
  2. La notion de fraude impliquant une malveillance au plus haut niveau des organisations impliquées ; les moyens de maîtrise « classiques » impliquant la bonne foi des parties prenantes (questionnaires, auto-déclarations, voire les audits) montreront vite leurs limites.

Par ailleurs citons de nouveau la résolution du Parlement, qui souligne au point 54 : « (…) que la réalisation des contrôles devrait être fondée sur les risques et impliquer le développement de profils de risques et d'évaluations de la vulnérabilité pour chaque chaîne d'approvisionnement et chaque produit alimentaire, (…)» tout en ayant bien remarqué au considérant M  « que la chaîne d'approvisionnement alimentaire est souvent longue et complexe, impliquant de nombreux exploitants du secteur alimentaire et d'autres parties; (…) que les exploitants du secteur alimentaire n'ont pas toujours, et ne sont pas tenu d'avoir, une vision d'ensemble de la chaîne de production; »

Une approche méthodologique possible se dessine alors : le Plan Food defense de chaque entreprise contient un volet relatif aux fournisseurs, impliquant de s’enquérir des risques de malveillance en amont ; cette exigence renvoie à l’analyse des dangers (et évaluation des risques associés) liés aux couples fournisseurs/matières premières pratiquées dans le cadre du système de management de la sécurité des aliments. Une option serait donc d’intégrer explicitement l’évaluation du risque de fraude dans cet outil déjà existant dans la plupart des cas. Au même titre qu’elle évalue les risques d’une contamination accidentelle en amont de l’entreprise (Food Safety)  l’équipe en charge de la sécurité sanitaire (intégrant ici bien sûr les acheteurs en charge des catégories concernées) peut élargir son champ à l’évaluation de la probabilité et de la gravité associées à une fraude en amont de la filière, qu’elle ait un impact ou non sur la santé des consommateurs. De cette évaluation résulteront les mesures de maîtrise à déployer (cf. fig. 1).

 

 
 

3. Quels moyens de maîtrise à l’échelle de l’entreprise ?

 

Un dernier extrait de la résolution du parlement (47) « (…) juge utile que le secteur alimentaire lui-même, en venant compléter le système de contrôles officiels du secteur agroalimentaire sans s'y substituer, développe de manière proactive et mette en œuvre des initiatives de lutte contre la fraude dans le secteur privé, tels que des vérifications de l'intégrité des produits, l'autocontrôle, l'analyse, les plans de suivi du produit, les audits ou les certifications (…) ».

L’implication croissante des industriels dans la lutte contre la fraude semble donc inéluctable, notamment par une incitation aux vérifications et aux contrôles. A ce titre la Charte de l’ANIA récapitule, pour les filières viande, les contrôles renforcés préconisés lorsque le risque de fraude est jugé significatif : contrôle documentaire des mentions obligatoires, contrôle des liasses de transport, contrôle visuel renforcé de la marchandise, contrôle organoleptique et, de manière plus exceptionnelle tant les coûts analytiques peuvent être élevés, le recours à des analyses par PCR, Elisa ou chromatographie.

Mais des précautions peuvent déjà être prises dès les premières étapes du référencement pour une filière que l’on sait « à risque », par exemple : le choix de fournisseurs avec une notoriété reconnue, une attention particulière en cas de prix de vente très inférieurs aux prix du marché, la prise en compte de la capacité du fournisseur à fournir des résultats d’analyses spécifiques, la validation de la politique d’achats des fournisseurs vis-à-vis de leurs propres fournisseurs sur les trois critères précédents…

 
 

Conclusion

 

De même que la lutte contre les contaminations intentionnelles la question de la fraude alimentaire nous mène sur un terrain anxiogène auquel les équipes ne sont pas préparées, celui de la criminalité.  Il est de ce fait particulièrement difficile à aborder sans tomber dans la surenchère de moyens. Le recours à une analyse des risques ad hoc, au bon niveau dans l’organisation de l’entreprise et impliquant les ressources adéquates, semble donc inévitable et souhaitable. Par ce moyen les professionnels démontrent qu’ils prennent leurs responsabilités, se posent les bonnes questions et surtout déploient des moyens adaptés, qui se mesurent à l’aune de l’expertise et du pragmatisme. Notre équipe peut vous y aider…

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