N°9 - ISO 22000 et référentiels privés (mai 2006) - 07 Juillet 2011 | Exaris.fr

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Où en sommes-nous ?

 

La FCD a émis une note le 24 mars 2006 établissant sa position vis-à-vis de la norme ISO 22000. Des échanges avec plusieurs professionnels au sujet de cette note nous ont amenés à rédiger cette édition spéciale d’Exaris Info. Il ne s’agit pas ici de dénoncer le bien fondé de la démarche de la FCD mais de vous en proposer un éclairage différent, en complément de notre lettre d’information n°3 (nov.2005).

Validée depuis maintenant 8 mois la norme ISO 22000 « Systèmes de management de la sécurité des denrées alimentaires » intéresse chaque jour un nombre croissant d’entreprises, par les réponses qu’elle apporte au besoin de structuration et d’harmonisation des systèmes de maîtrise de la sécurité alimentaire. Cette « normalisation » de l’application de la méthode HACCP constitue sans doute le repère qui manquait jusqu’alors aux filières agroalimentaires.

Toutefois le déploiement d’ISO 22000 n’en est qu’à ses débuts et son « rayonnement » est à ce jour freiné par quelques doutes qui demandent à être levés et par quelques faiblesses réelles ou supposées qu’il reste à consolider.

Bien que reconnaissant l’intérêt technique de cette norme, les distributeurs propriétaires de référentiels privés (IFS, BRC…) se retranchent derrière ces axes d’amélioration – inévitables au lancement d’une norme internationale – pour justifier le maintien de leurs propres systèmes de certification et rejeter la perspective d’une équivalence avec une certification ISO 22000 à moyen terme.

Nous vous proposons, à travers ces lignes, un point à date synthétique quant aux tenants et aboutissants respectifs de la certification ISO 22000 et des certifications privées, sous la forme d’un « portrait croisé »  avec l’IFS.

 
 

1. Origine, portée et objectifs

 

La norme ISO 22000, rappelons-le, est le fruit d’une réflexion internationale impliquant toutes les parties intéressées par la rationalisation et l’optimisation de la maîtrise de la sécurité alimentaire à l’échelle mondiale.

ISO 22000 concerne tous les professionnels impliqués directement ou indirectement dans l’élaboration et la mise à disposition de denrées alimentaires (cf. schéma 1).

 

De leur côté les propriétaires de l’IFS visent à assumer l’exigence qui leur est faite de maîtriser la sécurité et la qualité des produits fabriqués et vendus sous leurs marques. La portée de l’IFS se limite donc, dans sa conception initiale, aux seuls produits à marque de distributeur. Dans cet esprit, les propriétaires de l’IFS revendiquent la maîtrise absolue du contenu de leur référentiel. Les rédacteurs en sont des professionnels de la distribution, aidés par quelques consultants indépendants.

Quelques parties externes sont régulièrement consultées pour avis (organismes certificateurs, professionnels…) mais le contenu final du référentiel n’est en aucun cas le résultat d’un consensus entre parties intéressées.

 
 

2. Contenu technique et enjeux-clefs

 

La norme ISO 22000 est avant tout une norme méthodologique. Applicable à l’ensemble des opérateurs des filières agroalimentaires elle se doit d’être ouverte et de limiter les exigences de moyens à des aspects méthodologiques et organisationnels applicables par tous.

Contrairement à ce que l’on a pu lire, ISO 22000 ne traduit pas des exigences de résultat mais essentiellement des exigences de moyens, utiles pour atteindre les résultats fixés en priorité par les autorités réglementaires mais également par les clients.

Lorsque la réglementation impose l’application des « principes HACCP », ISO 22000 harmonise la traduction de ces principes en exigences de moyens méthodologiques : quelle expertise, quelles sources de référence pour identifier les dangers applicables à son secteur, quelles ressources humaines et techniques, quels moyens pour assurer l’exhaustivité de l’analyse, quelles règles pour déterminer des CCP ou des PRP Opérationnels, quels moyens pour vérifier l’efficacité continue du SMSA…

Certes les exigences de moyens encadrant les PRP (Programmes Pré-requis) ne sont pas détaillées au même niveau de précision que dans l’IFS, mais référence est faite aux exigences applicables dans chaque secteur considéré (Guides de bonnes pratiques du Codex Alimentarius). Détailler les PRP dans la norme aurait abouti à des négociations sans fin quant à leur pertinence dans tel ou tel secteur d’activité (notons qu’un projet allant dans ce sens – ISO TS2200X Eléments d’hygiène de base pour les programmes préalables – a été proposé par les Pays Bas mais n’est pas retenu à ce jour au niveau international). Peut-on imposer la même exigence de procédure de gestion des bris de verre à un restaurateur et à un industriel ? À un fabricant de flacons de verre et à un horticulteur ?

La pertinence du contenu des PRP est donc confiée aux professionnels et son évaluation aux auditeurs (cf. point 3). ISO 22000 exige toutefois que l’adéquation des moyens associés aux PRP avec les niveaux de risque identifiés soit documentée, prouvée et vérifiée.

Ce qui, si professionnels et auditeurs travaillent rigoureusement et consciencieusement, laisse peut de place aux dérives, dans un sens (exigences abusives) ou dans l’autre (systèmes trop légers).

 

De son côté l’IFS, bien que largement inspirée des normes internationales existantes (notamment ISO9001 pour ce qui concerne la conception d’un SMQ), n’établit aucune correspondance « officielle » avec ces normes (voir point 3). L’IFS apparaît donc comme un recueil d’exigences de moyens plus ou moins adroitement amalgamées, issues de l’expérience de ses auteurs et de leur connaissance des normes existantes. Le crédit que les professionnels accordent à la pertinence de son contenu peut donc légitimement varier.

Prenons le chapitre consacré à l’application de la méthode HACCP. Il est certes louable d’avoir cherché à traduire de manière opérationnelle les lignes directrices du Codex Alimentarius, mais l’IFS en extrait-il l’essentiel ? Il est surprenant par exemple qu’un « KO » soit associé à l’aspect documentaire (exigences de moyens très détaillées) et que si peu d’importance soit accordée à la notion de « limites critiques » (comment sont-elles déterminées et validées ?).

L’IFS se veut, de l’aveu même de ses propriétaires, un référentiel « concret et pragmatique », utile en particulier pour les PME. Il est vrai que sa lecture laisse peu de place à l’interprétation… Or nul ne peut prétendre être exhaustif dans le domaine de la maîtrise de la sécurité alimentaire ; la communauté internationale est aujourd’hui d’accord pour reconnaître que cette maîtrise doit se fonder sur des analyses de dangers en perpétuelle évolution, sous la responsabilité de chaque opérateur.

Tel qu’il est conçu aujourd’hui le référentiel IFS ne risque-t-il pas à terme de déresponsabiliser les professionnels en les dirigeant très (trop) précisément, au risque de les détourner de leurs responsabilités –  notamment celle de mener des analyses de dangers pertinentes et exhaustives pour une protection optimisée du consommateur. Les distributeurs n’auraient-ils pas plutôt  intérêt à s’appuyer sur la norme ISO 22000 et les réponses méthodologiques qu’elle apporte en y ajoutant si nécessaire leurs propres exigences (déjà présentes dans leurs cahiers des charges à marque distributeur) ?

 
 

3. Modalités de la certification

 

La norme ISO 22000 est certifiable depuis plusieurs mois déjà. La norme ISO 22003, censée harmoniser le protocole selon lequel cette certification doit être délivrée partout dans le monde (elle définit notamment les règles de calcul des durées d’audit, les modalités d’habilitation des auditeurs etc…), tarde cependant à être validée. Dans ce contexte, les organismes d’accréditation nationaux (tels que le COFRAC) définissent leurs propres programmes, que les  organismes certificateurs doivent respecter s’ils veulent proposer une certification ISO 22000 accréditée. Ce retard dans la validation de la norme ISO 22003 ouvre donc la voie à l’hétérogénéité des modalités de certification ; une situation qui devrait prendre fin avec la parution de la norme, planifiée pour le deuxième semestre 2006.

De son côté l’IFS est assorti d’un protocole de certification sous maîtrise intégrale des propriétaires du référentiel. Malgré un programme d’accréditation COFRAC,ce protocole prévoit notamment l’habilitation exclusive des auditeurs par les seuls propriétaires du référentiel. Par ailleurs l’IFS exclut toute possibilité de couplage d’un audit IFS (considéré comme une certification de « produits et process ») avec un audit ISO 22000 (certification de Système de Management), malgré les synergies évidentes de leurs contenus techniques.  S’il est donc légitime qu’aujourd’hui les distributeurs s’interrogent sur la fiabilité de la certification ISO 22000 au profit de leur propre démarche, il est également légitime que l’ensemble des professionnels concernés par l’IFS s’interrogent sur l’indépendance, l’objectivité et le crédit technique réels de cette certification.

 
 

Conclusion

 

L’ISO 22000 apporte sans nul doute une réponse intéressante :

}  D’une part au besoin des marchés d’une sécurisation internationale de la maîtrise de la sécurité alimentaire autour de l’application fiable et robuste de la méthode HACCP et à la nécessité de rationnaliser les démarches de certification qui l’entourent

}  D’autre part à la demande des professionnels quant à une interprétation normalisée de la méthode HACCP pour une application évolutive, harmonisée et reconnue par la majorité des parties intéressées, notamment les pouvoirs publics – ISO 22000 étant en phase avec les exigences du paquet hygiène notamment.

Il reste néanmoins à prouver la fiabilité de la certification ISO 22000, qui doit devenir un réel « label de bonne foi » en matière de sécurisation de la sécurité des denrées alimentaires. Il faudra pour cela que chacun joue son rôle dans les mois à venir, notamment :

}  Que tous les professionnels impliqués dans la sécurité alimentaire s’intéressent à la norme et cherchent progressivement à la déployer en amont et en aval de leurs activités, dans l’intérêt de tous

}  Que les organismes certificateurs s’attachent à mener des audits à haute valeur ajoutée, bien dimensionnés et axés sur la maîtrise opérationnelle au-delà du simple respect des principes méthodologiques

}  Qu’ISO ne tarde pas à valider la norme ISO 22003 pour une harmonisation rapide des pratiques de certification

}  Que les distributeurs (via le GFSI) reconnaissent la valeur de la certification ISO 22000 comme répondant à leur besoin de sécurisation de leurs productions, du point de vue de la sécurité alimentaire tout au moins…

 
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