N°62 - Etablir le « Zoning » d’une usine - 28 Avril 2014 | Exaris.fr |
ExarisInfo 62 - Zoning.pdf |
Quelle méthode appliquer ? |
||
Lorsqu’il s’agit de concevoir une nouvelle usine les équipes d’ingénierie disposent désormais d’une bibliothèque conséquente de bonnes pratiques d’implantation et de construction. Il s’agit notamment de dessiner les barrières appropriées, d’optimiser les flux en conséquence (personnels, matériels, matières, emballages utilités…) et de définir les règles qui devront être appliquées dans les différentes zones afin de garantir le niveau d’hygiène approprié selon la vulnérabilité du produit aux dangers de contamination ; autrement dit établir un zoning de l’usine en matière de maîtrise des contaminations croisées (zoning « hygiène »). Mais rares sont les projets de construction de nouvelles usines agroalimentaires aujourd’hui en France, au regard des projets industriels portant sur la modification d’outils existants. Si le zoning peut être traité très en amont lors de la conception d’une nouvelle usine, il est plus compliqué à maîtriser lorsqu’il s’agit de faire évoluer une infrastructure existante, notamment pour l’adapter à de nouvelles gammes de produits plus sensibles en matière d’hygiène. C’est pourtant une problématique à laquelle un grand nombre d’industriels est aujourd’hui confronté, la recherche de valeur ajoutée induisant des projets parfois difficilement compatibles avec les infrastructures existantes. Or il n’existe pas à ce jour de standard universel définissant les critères et la méthode à suivre pour parvenir à un zoning adapté, voire adaptable dans un contexte de « mix produit » évolutif. Nous vous proposons ici un rapide état des lieux des exigences et recommandations en matière de zoning ainsi qu’un aperçu de l’approche méthodologique que nous préconisons sur ce sujet.
| ||
1. Zoning et hygiène des aliments : que disent les normes et référentiels ? |
||
La première source que nous pouvons consulter est le règlement (CE) n°852/2004 qui contient quelques exigences au ch. I de l’annexe 2 (définissant les pré-requis applicables dans la chaîne alimentaire). Le règlement ne contient cependant pas d’exigences précises en matière de zoning. Les référentiels de certification reconnus par le GFSI (cf. Exarisinfo n°39) sont, pour leur part, un peu plus précis… Le tableau ci-dessous compare quelques exigences-clefs de l’IFS, du BRC et l’ISO/TS22002-1 en matière de zoning. On constate que le référentiel le plus précis en matière de zoning est le BRC. Son annexe 2 - Lignes directrices pour la définition des zones de production à risque » - définit 4 profils de zones selon le niveau de risque (cf. tableau ci-dessus). Un arbre de décision (schéma décisionnel) est également « proposé », étant entendu qu’une entreprise certifiée qui n’applique pas cette règle de décision est sanctionnée, à moins le cas échéant de démontrer l’application d’une méthode de classement alternative aussi efficace. De son côté l’ISO/TS 22002-1 impose également un zoning mais la méthode n’est pas définie et l’industriel est renvoyé à son analyse des dangers. Bien que reconnus équivalent à l’échelle internationale ces référentiels de certification ne sont donc pas homogènes dans leurs exigences relatives au zoning, induisant pour un certifié BRC des exigences de moyens plus contraignantes… mais sont-elles pour autant pertinentes ? | ||
2. Ce que proposent les professionnels |
||
L’approche préconisée par le BRC, voire imposée à défaut d’alternative, présente certes l’avantage de préciser les attentes en matière de zoning mais comporte également quelques biais ; notamment :
Cette approche induit par ailleurs une inflation dans les infrastructures à mettre en œuvre (sas, séparation physique stricte…) parfois incohérente avec l’analyse des risques interne. L’enjeu est donc de proposer une approche alternative, si possible indépendante, consensuelle et émanant des professionnels les mieux placés pour la définir, à savoir les industriels eux-mêmes. A ce titre les travaux de l’EHEDG[1] (European Hygienic Engineering Design Group) sont intéressants. Par exemple le guide EHEDG n°26 « Ingénierie hygiénique des unités de production traitant des pulvérulents » aborde le zoning en introduisant trois niveaux de zones : H (High hygiene), M (Medium hygiene), B (Basic hygiene). Outre des définitions plus ouvertes et pragmatiques, le guide EHEDG fournit également des recommandations élargies selon les zones, en fonction des produits qui y sont manipulés (nettoyage sec ou humide, matériaux, infrastructures, ouvertures, mise en place de zones de transition ou de sas…). Par ailleurs l’approche du zoning selon EHEDG ne se limite pas à la maîtrise des contaminations microbiologiques ; elle intègre pleinement les dangers allergènes, physiques, chimiques voire « Qualité » au sens large (par exemple la ségrégation des produits soumis à allégations tels que AB, Halal, Kasher, avec ou sans OGM…). Enfin « faire du zoning » ne se limite pas à établir des barrières physiques : il s’agit également de proposer une organisation du travail permettant de limiter les risques de contamination croisée. En complément un nouveau guide est en cours de finalisation (doc. 44 - HYGIENIC DESIGN PRINCIPLES FOR FOOD FACTORIES) qui, entre autres thèmes abordés, reprend ces notions de zoning pour l’ensemble des industries alimentaires. La version finale de ce guide n’est cependant pas encore publiée. [1] L’EHEDG est une association ouverte à tous ; elle a pour vocation de consolider les meilleures pratiques en matière de conception hygiénique ; d’abord centrée sur les équipements fermés l’expertise de cette association professionnelle s’est progressivement étendue à l’ensemble des problématiques matérielles de conception auxquelles sont confrontées les industries agroalimentaires. Exaris est membre de l’EHEDG depuis 2006.
| ||
3. Privilégier une approche globale, par domaines de risques |
||
En complément des considérations ci-dessus il est important de ne pas perdre de vue les limites de l’exercice imposé par le « zoning hygiène » ; d’autres types de zoning peuvent en effet interférer avec la contrainte de sécurité des aliments, notamment la sécurité des personnes et la « sûreté » (au sens de la lutte contre la malveillance). C’est dans cette optique que nous recommandons de déployer un zoning pertinent : après avoir déterminé le zoning par domaine de risque (sécurité sanitaire ou hygiène, sécurité des personnes, sûreté…) l’analyse du recoupement entre les différents zoning doit conduire à établir sur le terrain une communication visuelle unique et claire, uniquement lorsqu’elle est nécessaire et privilégiant la maîtrise des risques prioritaires. Par défaut le zoning visuel pourra être le zoning hygiène sans que, par exemple, les zones sensibles du point de vue de la sûreté soient visuellement identifiées, ce domaine de risque étant du ressort de l’équipe sûreté et soumis à une communication limitée et maîtrisée. Selon le même principe une zone ATEX pourrait être identifiée en zone B ou M, soumise à une communication complémentaire ciblée en évitant toute confusion. Enfin l’établissement d’un zoning pertinent doit pleinement intégrer l’impératif de performance de l’entreprise, dans une perspective de « lean management ». | ||
Conclusion |
||
Il s’agit donc d’éviter que le zoning se réduise à un plan de masse et à des schémas de flux redessinés par une équipe focalisée sur les contraintes d’hygiène, au risque d’entraîner des décisions partiales parfois lourdes de conséquences. Poser des définitions claires et harmonisées, systématiser la réflexion zoning dans les projets (R&D, travaux neufs…) intégrer tous les domaines de risques étendus à la performance de l’entreprise, prioriser les facteurs de risques, établir une communication visuelle adaptée… tels sont les enjeux auxquels toute entreprise agroalimentaire est confrontée. C’est dans cette perspective qu’est conçu notre nouveau module de formation « Intégrez le zoning dans vos projets ». | ||
Siège social |
Tél. +33 (0)9 51 19 32 12 |