N°45 -ISO 9001 : 2015 (nov 2010) - 07 Juillet 2011 | Exaris.fr

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Que faut il en attendre ?

 

La version 2008 de la norme ISO 9001, faute d’accord international, fut un non événement (cf. ExarisInfo n°30).

Toutefois dès la parution de cette « fausse nouvelle » version un nouveau travail de révision avait été enclenché ! La phase préparatoire initiée en février 2009 devrait se terminer en 2012   laissant place à une phase de rédaction pour une parution de la nouvelle version  à horizon 2015.

Si nous avons décidé de traiter de ce projet dans cette lettre c’est que cette fois il s’agirait d’une profonde évolution de la norme, que des concepts intéressants sont à l’étude et que depuis le 18 octobre 2010 et jusqu’au 31 janvier 2011, une consultation internationale a été mise en place pour recueillir les besoins et attentes des utilisateurs.

Nous essaierons ici de vous intéresser à ces travaux qui semblent souvent lointains et abstraits vus du terrain, mais qui pourtant vous concernent au premier chef.

 
 

1. Les 19 concepts

 

Voici les 19 concepts retenus par le groupe de travail [PRECISER QUI LE COMPOSE ?] et qui doivent alimenter la version 2015 de la norme :

-     Intégration d’une approche de gestion des risques

-     Renforcer le lien vers la conformité du produit

-     Performances financières de l’organisme

-     La maintenance des infrastructures

-     L’alignement avec les pratiques managériales

-     Le management par les processus

-     Le management des connaissances

-     Les notions de résultats / amélioration et efficacité

-     Le cycle de vie du produit

-     Les principes de management de la qualité

-     Compétence

-   Management de la chaîne d’approvisionnement (et externalisation)

-   Les outils qualité

-   La communication

-   Processus d’innovation

-   L’impact de la technologie et changement dans le management de l’information

-   Rôle du top management dans le système de management de la qualité (leadership) : objectif se rapprocher de l’EFQM

-   Client – clarification et différenciation des multiples clients d’un organisme

-   Agilité de l’organisme à répondre aux changements

 

Intéressons-nous à quatre de ces concepts : Intégration d’une approche de gestion des risques

La volonté semble très forte et légitime d’intégrer de manière explicite la gestion des risques, il conviendra cependant d’être vigilant quant à la définition du champ d’application : quels risques prend-on en compte ? Dans le secteur agroalimentaire, la méthode HACCP vise la maîtrise des risques liés à la sécurité des aliments ; en tant que composante fondamentale de la qualité du produit cette problématique doit donc légitimement être intégrée lors de la mise en place et de l’évaluation d’un SMQ conforme à ISO9001, Mais la gestion des risques financiers, humains (sécurité, santé au travail), environnementaux doit-elle également être prise en compte dans le cadre  de la norme ISO 9001 ? La question de la finalité de la norme et de son périmètre se pose dès ce premier concept et les deux suivants renforcent encore cette interrogation.

 

Ü  Renforcer le lien vers la conformité du produit

Le constat est simple, des entreprises utilisant la norme ISO 9001 (avec ou sans valorisation par une certification) livrent des produits qui ne répondent pas aux exigences de leur clients. La notion centrale de « conformité produit » semble aujourd’hui parfois laissée un peu de côté au profit des processus supports et du processus de management. Cette norme est-elle une norme de management ou une norme de management de la qualité des produits ? La frontière semble parfois floue, certains secteurs d’activité comme l’aéronautique avec l’EN 9100 ou l’automobile avec ISO/TS 16949 l’ont bien compris en créant des normes sectorielles basées sur les grands principes de l’ISO 9001 mais en venant y rajouter des exigences spécifiques à ces secteurs afin d’augmenter leur niveau de confiance dans la maîtrise de la conformité des produits fournis ou fabriqués. Dans l’industrie agroalimentaire, il existe deux normes ISO sectorielles complémentaires d’ISO9001 :

  • ISO 15161:2001, Lignes directrices relatives à l'application de l'ISO 9001:2000 aux industries de l'alimentaire et des boissons mais qui est très peu utilisée en France
  • ISO 22000 :2005 : Systèmes de management de la sécurité des aliments – Exigences pour tout organisme de la chaîne alimentaire ; nous avons déjà beaucoup écrit sur ce sujet, rappelons seulement que cette norme ne s’intéresse qu’à la sécurité des produits et non à leur qualité au sens large.

 

Ü  Performances financières de l’organisme

Ce point également mérite quelques commentaires, pourquoi une norme de management de la qualité devrait intégrer de manière aussi explicite les performances financières de l’entreprise ? La réponse est simple : satisfaire à la pression américaine qui souhaite intégrer cette dimension financière afin de permettre aux audits internes ISO 9001 de répondre aux exigences imposées par la  Loi Sarbanes-Oxley. Même si la performance financière d’une entreprise impacte directement sa capacité à fournir des produits et services conformes, Ce concept nous éloigne significativement d’une vision « produit/services » de la norme au profit d’une vision « Système  global » ; à ce titre il semble peu compatible avec le précédent.

 

Ü  Le management par les processus

L’intérêt du management par les processus n’est pas remis en cause ; la question récurrente sur ce sujet est la formalisation qu’elle implique et la rigidité qui en découle. L’enjeu réside donc dans la capacité des entreprises à adapter la formalisation des processus à leur structure, leur culture, leur mode de management…En gardant à l’esprit que le niveau de détail des descriptions de processus doit être parfaitement cohérent avec la valeur ajoutée attendue (cf. ExarisInfo 41)..

Ces concepts posent clairement le périmètre et l’utilité de cette norme : doit-elle devenir une norme de management, définissant un cadre destiné à piloter la maîtrise de tous les risques opérationnels, ou bien doit-elle rester centrée sur la maîtrise de la conformité des produits ou services pour répondre au besoin de réassurance des clients ?

 

 
 

2. Perspectives d’évolution de la certification ISO 9001

 

Même si tout le monde s’accorde pour considérer la norme ISO 9001 comme un outil de management de la qualité, sa certification par des organismes tiers reste, comme nous le montrent les propositions émises par le comité, au centre des débats… Il semble y avoir aujourd’hui une très forte volonté de développer une norme ISO 9001 en 3 niveaux, le premier niveau serait l’actuelle norme ISO 9001 :2008 puis deux autres niveaux seraient créés pour refléter la maturité des systèmes de management. Ce type de segmentation n’est pas sans rappeler l’époque de la cohabitation ISO 9001 / ISO 9002, chacune certifiable mais avec un périmètre différent... Le risque d’une perte de lisibilité et donc de crédibilité de la certification est sous-jacent. L’autre solution serait de coupler ISO 9001 à une annexe d’autoévaluation sur le modèle de l’ISO 9004:2009 (norme de qualité totale) : la certification du respect des exigences serait alors assortie d’une évaluation du niveau de maturité sur la base de l’annexe. Dans l’absolu cette seconde piste peut paraître prometteuse (vers une certification nuancée, par paliers), mais est-elle réaliste ? Les organismes certificateurs ont déjà essayé la certification graduelle (l’ISO14001 en 3 étapes, ou le « Pack PME » de certains OC…), sans grand succès. Doit-on s’en étonner sachant que l’esprit de ces normes n’appelle pas un scoring mais bien une adhésion sans réserve à des principes reconnus comme fondamentalement bénéfiques pour l’entreprise. On concevrait difficilement, dans cette logique, d’être « à moitié ISO9001 », ou ISO9001 « à la carte »… Il en va de la crédibilité du contenu de la norme.

 
 

3. Quel avenir pour l’utilisation de la norme ISO9001 ?

 

Comme le montrent les 19 concepts, le contenu ainsi que la philosophie de cette nouvelle révision, restent encore à ce stade à valider. Doit-on faire de cette norme une norme de management qui deviendrait le cadre d’un Système de management intégré basé sur l’analyse des risques au sens large ? Elle s’appuierait alors explicitement sur des normes thématiques comme ISO 14 0001, ISO 22000 et OHSAS 18001. Auquel cas il manquerait une norme thématique sur la maîtrise de la qualité et de la conformité des produits/services. Doit-on recentrer cette norme exclusivement sur la conformité produit et laisser la gouvernance des entreprises à leur management sans définir aucune exigence normative associée ? Ou doit-on, comme aujourd’hui rester sur une norme hybride mélangeant du mangement et de la conformité produits et ou chaque utilisateur décide du périmètre d’utilisation de la norme ? Une entreprise peut intégrer la dimension environnementale à son Système de Management de la Qualité, une autre la dimension sécurité, santé au travail et une troisième décider de ne se concentrer que sur la conformité produits…

Pour notre part nous avons toujours milité pour faire de la norme ISO 9001 un outil de management global permettant aux entreprises de déployer un système sur l’ensemble du périmètre de l’entreprise dans lequel pourront venir facilement s’intégrer des dimensions sécurité sanitaire des aliments, environnement et/ou sécurité, santé des personnes. En revanche, il convient de bien séparer cette approche centrée sur le management de l’entreprise de la question beaucoup plus prosaïque de la valorisation de cette norme par une certification tierce partie. Dans ce second cas l’entreprise doit être très claire sur son périmètre et sur l’objectif attendu : s’il s’agit de donner confiance à un client sur la maîtrise de la conformité de ses produits, alors le champ de l’audit devra se limiter à la qualité produits sans que la maîtrise de l’environnement et de la sécurité, santé au travail n’aient d’impact sur les résultats de l’audit de certification. Il convient donc de distinguer l’utilisation d’une norme comme un outil de management de l’utilisation d’une norme en vue d’une certification avec un champ qui pourra être beaucoup plus restreint. Aujourd’hui, la forme actuelle  de la norme ISO9001 cette double utilisation, génére parfois quelques difficultés lors d’audits de certification quant à la recevabilité d’écarts sur l’environnement ou la sécurité des personnes. 

 
 

Conclusion

 

Au cours des années 2000 la certification ISO9001 a vu sa cote baisser dans le secteur agroalimentaire, supplantée par des normes ou référentiels plus opérationnels centrés sur la maîtrise des risques produits. Cependant il semblerait que les professionnels s’y intéressent de nouveau, progressivement, conscients que d’une part la Qualité ne se limite pas à la Sécurité des produits et que d’autre part les principes de management véhiculés par la norme sont des facteurs de performance indéniables, pourvu qu’on accepte de les déconnecter d’une seule finalité de certification. Les débats sont ouverts, et si vous souhaitez y participer l’ ISO a mis en ligne une enquête https://www.surveymonkey.com/s/76283BT.

En attendant, le bon sens couplé à l’expertise continuent à produire de la performance et de la maîtrise, certification ou non !

 
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